FETE DE SAINT FIRMIN
CATHEDRALE D’AMIENS
27 SEPTEMBRE 2009
BONNE NOUVELLE : TOUS CONCERNES !
« Ah ! Si le Seigneur pouvait mettre son Esprit sur eux, pour faire de tout son peuple un peuple de prophètes ». Tel est le souhait de Moïse à l’annonce du jeune homme : « Eldad et Médad prophétisent dans le camp ! » J’ose m’associer au souhait de Moïse. « Ah ! Si tout le peuple de la Somme pouvait devenir un peuple de prophètes pour notre monde d’aujourd’hui. »
Frères et sœurs, chers amis, nous voici rassemblés en notre belle cathédrale pour célébrer Saint Firmin, premier évêque et fondateur de notre diocèse. Nous sommes venus des quatre coins de notre département et même d’au-delà des Pyrénées, en ce pays qui envoya Saint Firmin. La mémoire des hommes ne remonte pas au temps de Saint Firmin. Aucun écrit ne vient s’enraciner en ce 3ème ou 4ème siècle de notre ère. Les historiens se font prudents. Notre foi s’attache au passé pour mieux vivre le présent et espérer le salut de Dieu. Il nous faut pourtant entendre ce qui est peut-être une légende, c’est à dire ce qui est à lire et à écouter comme une tradition qui se perd aux aurores du début du christianisme.
Je vais vous raconter une histoire qui constitue notre histoire.
Les historiens voient en Firmin le premier évêque d'Amiens où il aurait subi le martyre au 4ème siècle. La légende du portail nord de la cathédrale d'Amiens se base sur un écrit du 9ème siècle. Le sénateur Firmus conduisait son fils, le futur saint Firmin, au temple de Jupiter à Pampelune en Espagne quand il rencontra le prêtre chrétien Honestus qui lui parla de Jésus et lui fit rencontrer une semaine plus tard son maître, saint Saturnin, l'un des soixante-dix disciples de Jésus. Saturnin, à Pampelune, convertit quarante mille personnes en quelques jours dont le jeune Firmin qui, avec l'âge, devint un fidèle prédicateur du Christ. Firmin à vingt-sept ans reçut le sacre épiscopal, évangélisa l'Aquitaine, l'Auvergne, le Beauvaisis et s'en fut à Amiens. C'est là qu'il fut arrêté et discrètement assassiné par le gouverneur païen qui craignait les trop nombreux chrétiens de la région. L'histoire est belle, mais les détails sont peu historiques.
Que retenir de cette belle histoire. Le souci de lier l’Eglise à un destin apostolique, Saint Saturnin. Le prêtre Honestus parle de Jésus et l’invite à rencontrer un maître. Saint Firmin se convertit. Il devient évêque à 27 ans… bien jeune mais la valeur n’attend pas le nombre des années. Il fut un puissant évangélisateur : Aquitaine, Auvergne, Beauvaisis et Amiénois. Là, il y laissa sa vie. Qui sait s’il ne se serait pas déplacé plus loin encore !
Voilà Firmin venant s’enraciner en notre pays. Il est un disciple qui devient un fondateur d’Eglise un modèle, un exemple, un maître. Il a transmis la foi à ceux qui sont nos ancêtres en notre pays picard.
Permettez-moi d’évoquer une deuxième figure qui marque la foi chrétienne en ce premier millénaire. Je veux parler de Saint Martin. Une délégation de Tours vient dire les liens qui unissent tous ceux avec qui nous partageons l’héritage. Dans sa première encyclique, le Pape Benoît XVI rappelle qu’ « aux portes d’Amiens, Martin partage en deux son manteau avec un pauvre : Jésus lui-même, dans la nuit, lui apparaît en songe revêtu de ce manteau, pour confirmer la valeur permanente de la parole évangélique : « J’étais nu, et vous m’avez habillé… Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mat 25,36.40).
Pour prendre l’expression de Mgr. Jacques Noyer, ce qui est à entendre, à voir, à méditer est « la puissance symbolique de ce geste… le geste de Martin, païen, vient dire l’essentiel de la charité chrétienne ». Il ne s’agit pas de faire la charité parce que nous sommes chrétiens mais faisant la charité, nous devenons chrétiens. Au siècle de l’image, ce geste d’un soldat romain est une invitation à ouvrir les mains et les cœurs envers tous les pauvres, particulièrement ceux qui n’ont pas de vêtements, de toit, de nourriture et de visite pour rependre les traits anthropologiques de la fin de l’Evangile de Matthieu.
Avec Firmin, c’est la foi qui nous est contée. Avec Martin, c’est la charité qui nous est montrée. Avec chacun d’entre nous, disciples et témoins, c’est l’espérance qui doit nous être offerte. Aujourd’hui, notre monde a soif de retrouver un horizon de vie enracinée dans ce faire confiance de la foi, dans c’est aimer en vérité qu’est la charité et dans l’espoir d’un monde meilleur qui ouvre à l’espérance christique.
Si nous avons besoin de faire mémoire de nos Pères dans la foi et la charité, c’est pour nous appuyer sur leur propre chemin comme sur un bâton de pèlerin. Voici comment Saint Hilaire décrivait le chemin de Dieu en eux :
« De cette cité, Dieu est depuis longtemps le gardien vigilant : il protège Abraham dans sa vie nomade, il préserve Isaac de l’immolation, il enrichit Jacob dans sa servitude, il fait de Joseph vendu le chef de l’Egypte, il soutient Moïse devant Pharaon, il choisit Josué comme chef de guerre, il délivre David de tous les dangers, il console Salomon du don de la sagesse, il assiste les prophètes, il ravit Elie au ciel, il choisit Elisée, il nourrit Daniel, il rafraîchit les trois enfants dans la fournaise et s’adjoint à eux. Lorsqu’il est conçu de la Vierge, il instruit Joseph par un ange et il rassure Marie ; il envoie Jean devant lui ; il choisit les Apôtres et il prie le Père en disant Père Saint, garde-les ; quand j’étais avec eux, je les gardais en ton nom. Enfin après la passion, il promet de veiller sur nous et de nous garder éternellement, lorsqu’il dit : Voici que je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps. »
La catéchèse n’est pas avant tout un savoir mais une proposition de rencontre. C’est un chemin de rencontre avec Jésus-Christ. Il souhaite devenir l’ami de chacun. L’amitié ne se programme pas, elle s’offre comme un bouquet de fleurs multicolores. L’amitié est ce lieu du sensible de nos personnalités. L’amitié ouvre à la connaissance de l’autre. Rencontrer le Christ c'est devenir son ami et apprendre à le connaître. Si la catéchèse est un chemin de rencontre, un chemin de foi, elle est aussi un chemin de connaissance de l’identité du Christ. Cette identité du Christ nous est donnée dans cette intimité du cœur à cœur et dans la Tradition bi-millénaire de l’Eglise. Il serait vain de séparer ces deux modes de connaissance. Cela conduirait soit à un subjectivisme solitaire et délétère soit à une rigidité institutionnelle inféconde.
Bonne Nouvelle : Tous concernés. Ce matin, nous nous sommes appropriés le "Texte Diocésain de Catéchèse" que je vais promulguer dans quelques instants. Il concerne chacun de nous et toutes les communautés auxquelles nous appartenons. Prenez le temps de le lire, de l’approfondir et de le mettre en œuvre. Il vient dire l’Esprit qui travaille au cœur de notre diocèse. Il est le fruit d’une belle collaboration diocésaine.
Vous allez aussi recevoir deux évangiles selon Saint Marc : vous verrez que la maquette de ce livre est magnifique. L’un est pour votre chemin spirituel, l’autre est à partager avec un voisin. Nous avons souhaité se mettre ensemble autour de la Parole qui est le Christ. C’est au cœur des paroles de l’Evangile que nous rencontrons la Parole de Dieu, Jésus-Christ.
Faites-en un usage immodéré… Puissiez-vous vivre des paroles de Saint Paul dans l’adresse qu’il fait aux chrétiens de Corinthe : « Si j’annonce l’évangile, je n’ai pas à en tirer orgueil, c’est une nécessité qui s’impose à moi. » Quelle parole puissante et vertigineuse : c’est une nécessité qui s’impose à moi.
Et voici l’Evangile : « Allez dans le monde entier. Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création. » Une formidable espérance est née ce matin de Pâques. Dieu a balayé le principe de la victoire de toute mort sur la vie. Notre horizon de vivants est cette vie de Dieu. Dieu ne désire que notre bonheur et que nous soyons des vivants. « L’homme vivant est la gloire de Dieu et la vie de l’homme est la vue de Dieu ».
Frères et sœurs, chers amis, entrons en conversation avec Dieu, entrons en conversion pour vivre des temps nouveaux pour une Bonne Nouvelle qui nous concerne tous. Ensemble nous serons catéchisant et catéchisés.
Bonne Nouvelle : Tous concernés !
+ Jean-Luc BOUILLERET
Evêque d’Amiens